« Tout en prenant conscience que cette catégorie, du fait de son expansion numérique, s’est beaucoup diversifiée, on peut dire maintenant que le cadre, d’un certain point de vue, est le miroir grossissant du travail. Autrefois existait la coupure entre exécutants et encadrants. Aujourd’hui les formes du travail ont changé avec ce qu’on peut appeler le capitalisme d’innovation. Même s’il est juste de dire qu’il y a eu une révolution financière qui a donné le pouvoir à l’actionnaire, une autre caractéristique du capitalisme contemporain est qu’on est passé d’un capitalisme d’organisation – avec des normes, des règles, des prescriptions, qui organisent le travail – à un capitalisme d’innovation où il est important de mobiliser la capacité à s’adapter, parce que le monde n’est pas stable et bouge en permanence. Le travail est d’abord défini par des capacités d’adaptation, de réactivité, de coopération aussi, alors que lorsque l’on obéit à des règles, la question de la coopération est relativement secondaire. La figure du cadre est le miroir grossissant de ce nouveau capitalisme d’innovation, avec toutes ses contradictions et ses problèmes ».
Pierre Rosanvallon lors des 15 ans de l’Observatoire des Cadres, 29 mars 2012, in Jean-Marie Bergère et Yves Chassard, « À quoi servent les Cadres », Odile Jacob, 2013.